Il y a quelques temps déjà, j’ai entrepris d’écouter le podcast Quoi de meuf, produit par Nouvelles écoutes, en commençant du début. (Je propose d’ailleurs une liste de podcasts ici). Si de manière générale j’aime beaucoup, un épisode m’a laissée un peu amère. L’épisode 38 « Ta mère la féministe ».
Si celui-ci aborde de manière assez juste selon moi l’empowerment ou empouvoirment que peuvent représenter la grossesse et la maternité, j’avoue avoir eu du mal à comprendre la véhémence envers l’allaitement.
Un sujet que je vais essayer d’aborder dans cet article, à froid, avec quelques témoignages : l’empowerment de l’allaitement.
Les propos du podcast
Vous pouvez trouver l’épisode sur le site de Nouvelles écoutes ou sur les applis dédiées, mais j’ai retranscris un petit bout :
« Pour résumer aujourd’hui les revendications féministes liées à la maternité quand on ose aborder ce sujet touchy et un peu ringard touchent notamment aux violences gynécologiques et obstétricales, au pouvoir des médecins et aux conditions d’accouchement. Ce qu’on demande c’est surtout une reprise en main par les personnes concernées de l’ information tout simplement pour qu’elle circule et pour aller un peu à l’encontre du discours dominant qui est très très euphorique. »
Mais ensuite, les chroniqueuses parlent de cet article de Slate, qui démontrerait que les recommandations officielles en terme de santé ne seraient pas basées pour la plupart sur des faits scientifiques.
Avant de parler de mères qu’on forcerait à allaiter dans des maternités parisiennes.
Elles vont même jusqu’à parler de lobby de l’allaitement à travers l’association La Leache League, qui ferait du lobbying jusqu’auprès de l’OMS…
Seul le mum shaming des mères qui allaitent dans des lieux publics est évoqué.
S’il est dit pour la maternité qu’au delà du fait de pouvoir choisir la maternité, il faut aussi accompagner celles qui la veulent le même schéma n’est étrangement pas appliqué pour l’allaitement. La question se résumerait ainsi à avoir le choix d’allaiter ou non. Et basta ?
Mon propos n’est pas là pour remettre en question ce choix, mais pour questionner qu’on ne cherche pas à accompagner les femmes qui souhaitent allaiter.
Qu’on ne questionne pas le fait qu’une mère qui veuille allaiter puisse avoir des difficultés à trouver des informations fiables, du soutien, y compris de la part de professionnel.le.s de la santé.
Non les femmes qui allaitent ne sont pas plus chouchoutées que les autres, que ce soit à la maternité ou ailleurs. Voire les femmes qui allaitent peuvent subir une pression énorme dès l’accouchement, avec un choix d’allaiter remis en question soit par la parole soit par le non accompagnement. Pression pour peser le bébé, pour lui donner des compléments, pour arrêter parce que ça ne servirait à rien, etc.
Et cette pression peut se poursuivre tout au long de l’allaitement et peut être exercée au delà du corps médical. Milieu professionnel, entourage, etc.
Les témoignages sont nombreux sur Paye ton allaitement.
Je ne comprend pas pourquoi on refuse aux femmes allaitantes la reprise en main pour faire circuler l’information et aller à l’encontre du discours dominant comme pour la grossesse et la maternité.
Parce que oui, quoiqu’on en dise, le discours dominant reste en faveur du non allaitement. Si en 2017 67,6% des bébés étaient allaités à la naissance (pas nécessairement de manière exclusive), ils n’étaient plus que 22,8% à 6 mois et 13,1% à 1 an. (chiffres basés sur les certificats de santé remplis lors des visites obligatoires).
Par ailleurs, j’avoue que le fait qu’on puisse parler de lobby de l’allaitement me fait sourire.
Une petite définition de lobbying : « Le lobbying est une stratégie menée par un groupe d’intérêt, groupe de pression et groupe d’influence, appartenant à un même secteur d’activité professionnelle et cherchant à défendre ses propres intérêts auprès des décideurs politiques. ».
On pourrait plutôt parler de lobbies des fabricants de PCN et de l’industrie financière qui en émane et représente des millions voire des milliards à travers le monde.
On pourrait parler des scandales sanitaires qui entachent des marques comme Nestlé et compagnie. On pourrait parler de la manière dont ces marques promeuvent leurs produits, en faisant fi du code international et parfois des lois.
Vous pouvez retrouver à ce sujet l’article Les lobbies et l’allaitement de Maman Lune et celui que j’avais écris il y a quelques temps Ces marques anti-allaitement.
L'empowerment de l'allaitement
Au-delà de tout ça, nombreuses sont les femmes à ressentir l’allaitement comme empouvoirant, dans la continuité de la grossesse et de l’accouchement, ou pas.
Une femme peut percevoir son corps comme fort, pour avoir conçu et fait grandir son bébé, elle peut le voir comme fort également pour sa capacité à le nourrir. D’ailleurs, l’allaitement peut être une manière de se reconnecter à son bébé après un accouchement « difficile ».
J’ai posé la question :
« Est-ce que l’allaitement a un aspect « d’enpouvoirment » selon vous ? Si oui comment cela s’est manifesté pour vous ? Comment vous le vivez ? » sur un groupe d’allaitement.
Voici quelques réponses.

« L’allaitement étant anti-capitaliste (on n’a pas besoin d’acheter de trucs et machins pour pouvoir nourrir son enfant), j’ai la fierté de savoir que mon allaitement ne pollue pas et n’exploite pas les pays du tiers monde pour traiter les déchets. Je sais aussi que c’est la nature humaine qui fonctionne comme ça, je reviens aux sources. Faire autrement me paraît aliénant en fait. Je pense qu’il faut creuser les arguments de l’eco féminisme. »

« Pour ma part je ressens totalement ce sentiment d’empouvoirement et non l’inverse. Effectivement les gens sont souvent surpris par l’allaitement long et le co-allaitement et voient ça comme un sacrifice, parfois ça impressionne. Même si oui il y a la fatigue et beaucoup de temps passé avec mes enfants, je me sens justement libre d’être à l’écoute de ma nature de mammifère et en dehors des injonctions de la société capitaliste (consommer des préparations pour nourrissons, retour rapide dans le monde du travail et le dictat du corps parfait… ). On apprend à dépasser le regard des autres et on sait qu’on donne le meilleur à nos enfants «
« Pour moi oui, mais également la grossesse et l’accouchement. Je me suis sentie « powerful » (je ne trouve pas le mot en français) quand j’enceinte et quand j’ai accouché de mes jumeaux. j’ai pensé wow J’AI FAIT ÇA. Et maintenant je produis du lait pour eux, ils sont en bonne santé grâce à mon lait, ils ont grandi grâce à mon lait. Et après il y aura d’autres choses. Toute La maternité est de l’empowerment pour moi.«

« L’allaitement m’a (re)connectée à mon instinct, aux lois de la nature, ça a été un ancrage puissant et essentiel qui m’a permis de tenir le cap même en pleine tempête. J’ai accouché deux mois et demi avant terme. Je voulais allaiter. J’ai tiré mon lait et ma fille l’a reçu dès ses 1ers jours. Ça a été un lien essentiel pour me sentir maman pendant les débuts de son séjour en néonat. Je m’y suis accroché comme à un canot de sauvetage. Et j’étais fière des quantités de plus en plus importantes tirées et de ma fille qui a rapidement pris le sein bien que toute petite encore. J’ai poursuivi un allaitement exclusif pendant quelques mois une fois rentrées à la maison. Je sais que mon lait l’a aidée à toujours être en bonne santé malgré sa prématurité ! Je suis fière de notre parcours et je me suis découvert une force incroyable, de persister malgré les douleurs, les difficultés. J’ai appris beaucoup de choses sur moi, sur les vertus incroyables de cet or blanc que mon corps produisait ! (…) »
Pour aller plus loin
Le sujet de l’empowerment et du féminisme est abordé à partir de la 31ème minute dans l’épisode 14 du podcast Prosecco. Après l’ensemble de l’épisode reste intéressant.
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